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Talking Telematics: the show dedicated to connected insurance and smartphone telematics

Talking Telematics #4 : Les clés de la réussite d'un programme d'assurance connectée

11/04/2024 • Valentin Juillard

Talking Telematics est une série d'entretiens entre Philippe Moulin, CEO de DriveQuant, et des experts de l'assurance. Tous les sujets abordés dans ces échanges sont exclusivement liés à la télématique et aux avantages de la technologie pour le secteur de l'assurance automobile.

L'interview qui suit est la transcription d’un podcast animé par Florian Graillot, VC chez Astoria.io, et Philippe Moulin. La transcription a été éditée pour faciliter la lecture.

 

Florian : Bonjour Philippe, je suis très heureux de te retrouver. Notre première conversation portait sur l'évolution technologique de la télématique au cours des dix dernières années. Aujourd’hui, je souhaite m'interroger davantage sur la valeur ajoutée que cette technologie apporte aux assureurs. Pour commencer, peux-tu nous expliquer comment fonctionne la plateforme télématique de DriveQuant ?

Notre plateforme de traitement des données de conduite est le premier élément sur lequel nous avons travaillé. La plateforme traite toutes les données de conduite quelle qu’en soit la source. Certains de nos clients utilisent simplement notre API pour traiter les données de conduite issues de leurs boîtiers. Notre expertise, ce qui nous différencie des autres acteurs du marché, c’est les algorithmes de traitement des données que nous avons conçus. Nous les avons d’ailleurs tous brevetés.

Très rapidement, nous nous sommes rendu compte que le smartphone est le meilleur outil pour collecter des données de conduite. Pour trois raisons :

  • Les téléphones sont équipés de capteurs de très bonne qualité qui collectent une multitude de données, et les systèmes d’exploitation des smartphones sont performants.

  • L’avantage des smartphones par rapport aux boîtiers télématiques, c’est qu’il s’agit d’une solution évolutive. On peut déployer un programme à très grande échelle facilement car il y a un smartphone dans chaque véhicule. De plus, on peut déployer de nouvelles fonctionnalités simplement en mettant à jour l'application.

  • Enfin, c’est un appareil qui nous suit partout et avec lequel on interagit constamment. C’est donc un outil formidable pour créer de nouvelles interactions entre les assurés et les assureurs, particulièrement à des fins de sécurité routière.

Pour toutes ces raisons, nous avons développé un ensemble complet d’outils pour collecter les données de conduite à partir des smartphones. Pour les assureurs auto qui ne disposent pas d’une application mobile, nous avons conçu une application en marque blanche. Cela leur permet de lancer rapidement un produit d’assurance connectée sans avoir besoin d’investir dans le développement d’une app.

Pour les assureurs qui disposent déjà d’une application, ou qui visent un volume important d’utilisateurs à court terme, nous avons développé DriveKit, un SDK télématique. En intégrant notre SDK à leur application, ils bénéficient de l’ensemble de nos services connectés (scores de conduite, détection d’accident, challenges de conduite, coaching, assistance connectée…).



Florian : Ok, donc les assureurs ont deux moyens différents de collecter les données. Cela nous amène naturellement à la question de la valeur ajoutée. Pour bien comprendre les bénéfices de la technologie, peux-tu nous parler de tes clients ? Qui sont-ils ? Comment utilisent-ils votre technologie ? Pour quels résultats ?

Aujourd’hui, nous avons une trentaine de clients actifs qui utilisent notre solution Software-as-a-Service (SaaS). C'est une solution unique, générique, qui est partagée par l'ensemble de nos clients. Bien entendu, nous proposons des options de personnalisation, notamment avec le SDK DriveKit.

Nous travaillons avec plusieurs acteurs issus de la gestion de flotte. Ces organismes souhaitent bénéficier de fonctionnalités télématiques spécifiques comme l'écoconduite ou les challenges. Mais nos principaux clients sont des acteurs du monde de l'assurance.

En France, nous travaillons avec tous types d’acteurs. Cela va de start-ups fraîchement lancées à des assureurs traditionnels comme Covéa et MAIF.

Avec Covéa, nous avons développé un programme de prévention routière appelé DrivMeUp, à destination des assurés MAAF et GMF. L’objectif est de réduire l'usage du téléphone au volant.

Avec MAIF et sa filiale Altima Assurances, nous avons conçu un programme d'assurance à la minute, puis un second programme d'assurance au kilomètre.

Nous avons également APRIL comme client. Nous avons lancé ensemble une assurance au comportement, du Pay-How-You-Drive, destinée aux jeunes conducteurs.

Nous travaillons aussi avec un courtier d'assurance appelé YEET qui propose une assurance Pay-How-You-Drive aux chauffeurs VTC.

Roole, anciennement Club Identicar, est un de nos principaux partenaires. C’est un club automobile qui offre une complémentaire d’assurance et propose des services de rachat de franchise, d’assistance 0 kilomètre et d’extension de garantie. Ils utilisent les données de conduite pour faire de la prévention, pour engager leur communauté d’utilisateurs et pour mieux comprendre les besoins de leurs adhérents à des fins de marketing.

Nous sommes également très présents à l’international.

En Italie, nous avons un partenariat avec Quixa autour de la détection d’accident et de la promotion de l’écoconduite.

Au Danemark, nous avons lancé un programme de prévention routière avec LB Forsikring, un des plus grands assureurs du pays. Les assurés qui s'inscrivent au programme et qui conduisent bien peuvent réduire le montant de leur franchise. C’est une nouvelle approche intéressante qui ne joue pas sur le montant de la prime d’assurance mais sur le montant de la franchise.

En Afrique, nous travaillons avec un assureur tunisien et nous sommes sur le point de lancer un projet important en Afrique du Sud avec un des plus grands assureurs du marché.

Nous avons donc beaucoup de projets différents qui couvrent tous les types de produits d’assurance connectée. La plupart du temps, il y a un fort accent sur la prévention. De plus en plus, nous avons des projets qui se développent autour de la tarification et de l’assistance connectée.

 

Florian : Merci pour ces précisions, cela donne un bon aperçu de ton portefeuille clients. Le terme assurance connectée prend tout son sens quand on t’écoute ! Au-delà des assureurs que tu viens de citer, je crois savoir que vous travaillez également avec un réassureur de premier plan. Peux-tu nous en dire plus sur ce partenariat ?

Oui, nous sommes le partenaire stratégique de SCOR pour tout ce qui concerne les produits d’assurance connectée. Notre partenariat vise à accompagner les petits et moyens assureurs du monde entier qui souhaitent lancer un programme d'assurance à l'usage ou au comportement. Ces assureurs ont besoin d’être soutenus d’un point de vue financier et technologique. En collaboration avec SCOR, nous leur fournissons une solution clé en main.

 

Florian : Revenons à la question de la valeur ajoutée. Peux-tu nous en dire plus sur l’impact de ces solutions sur la chaîne de valeur de l’assurance ?

Traditionnellement, lorsqu’on parle d’assurance connectée, la première chose qui vient à l’esprit est la tarification modulaire. C’est bien entendu un élément important de l’assurance connectée.

Les assureurs lancent de plus en plus de programmes d’assurance au kilomètre ou d’assurance à la minute, car plus vous conduisez, plus le risque est élevé. Il est donc logique de proposer des produits d’assurance spécifiques aux conducteurs qui utilisent peu leur véhicule.

Les programmes Pay-How-You-Drive se développent également car ils permettent de fidéliser les bons conducteurs. Toutefois, l’assurance connectée ne doit pas être cantonnée à l’aspect pricing. C’est bien plus large que ça !

Comme je l'ai dit plus tôt, l'aspect prévention occupe une place de plus en plus importante. Si vous collectez les données de conduite des assurés, il est important de leur restituer de la valeur. C'est un échange. Les assureurs doivent partager la valeur avec leurs clients. Dans le cas contraire, c'est-à-dire si l’échange est asymétrique et bénéficie uniquement à l’assureur, l’assuré aura alors la perception d’être fliqué. Le partage des données doit contribuer in fine à réduire le risque routier de l’assuré. C’est tout l’enjeu et toute la valeur ajoutée de l’assurance connectée.

Sur les marchés les plus matures, des services connectés comme la détection d’accident se développent rapidement. Les données de conduite sont alors exploitées pour améliorer l’assistance en cas de collision grave. Les équipes d'assistance sont automatiquement notifiées d’un accident et peuvent alerter les services d'urgence si besoin. Pour les collisions avec des dégâts matériels légers, les données de conduite contribuent à accélérer et à améliorer la gestion des sinistres. C’est un véritable atout en termes de satisfaction clients. 

Toutes les verticales de l’assurance peuvent bénéficier des données de conduite. Avec plus d’une soixantaine de projets lancés à notre actif, nous avons constaté que les programmes d’assurance connectée avec les résultats les plus probants sont ceux où l’assureur s’est véritablement transformé autour de la technologie, et utilise la data dans tous ses métiers. En tant que fournisseur de télématique, nous sommes au cœur de la digitalisation de l’assurance car les données de conduite impliquent aussi bien le marketing que la prévention, la tarification, l’assistance et la gestion de sinistres.

 

Florian : Concernant les résultats que tu évoques, as-tu des chiffres à partager ? Et plus largement : quels sont les objectifs que tes clients ont en tête lorsqu’ils décident de travailler avec vous ?

On peut se référer à de nombreux indicateurs pour mesurer l’impact d’un projet connecté. Tout dépend de la nature du programme.

Pour les programmes de sécurité routière, nous surveillons de près la réduction de la fréquence de certains indicateurs critiques comme les freinages brusques et la distraction téléphonique. En général, nous constatons que les programmes de prévention réduisent d’environ 30 % l’usage du téléphone au volant, si le programme est bien exécuté et que les assurés sont impliqués dans le programme.

Ce n’est pas rien de réduire de 30 % la distraction. Il y a un impact direct sur la sécurité routière. Pour garder les utilisateurs motivés et engagés, les challenges de conduite sont un outil puissant.

Lorsque nos clients interrogent leurs utilisateurs sur les programmes de prévention routière, les résultats de l'enquête sont toujours positifs. Les programmes de prévention sont une véritable opportunité pour les assureurs de créer de nouvelles interactions avec leurs assurés.

Une autre métrique que nous surveillons est la notation des applications sur l’AppStore et le Play Store. La plupart de nos applications obtiennent plus de 4 étoiles, ce qui est très satisfaisant pour des apps d’assurance.

Et bien sûr, nous suivons avec attention plusieurs indicateurs assurantiels clés comme le ratio combiné. Récemment, un client m'a informé que son ratio combiné était inférieur à 50 %. C'est impressionnant ! Bien entendu, d’autres facteurs que la technologie ont contribué à une telle performance. Mais ce n’est pas un hasard si tous les produits d’assurance connectée bien exécutés ont une rentabilité très satisfaisante !

 

Florian : Cela me fait penser à une rengaine qu’on entend souvent chez les assureurs : « 80 % des automobilistes pensent qu'ils conduisent mieux que la moyenne ». Au-delà de la plaisanterie, c’est un point souvent soulevé lorsqu’on parle d’assurance connectée. N’y-a-t-il pas un écart entre d'une part, la perception des clients qui pensent être d’excellents conducteurs, et s’attendent donc à payer moins cher leur assurance, et d’autre part, la vérité des données qui n’aboutit à aucune ristourne ? Comment vous adaptez-vous face à cette tension entre les assurés et les assureurs ? Peut-être as-tu des bonnes pratiques à nous partager ?

On est là au cœur de notre produit. En tant que fournisseur de télématique, nous développons et fournissons une technologie de collecte de données de conduite aux assureurs. Au final, ce qui importe vraiment c'est la manière dont les données sont utilisées puis partagées. Je le répète souvent : les données doivent apporter de la transparence.

Nous encourageons tous nos clients à restituer, sous une forme ou sous une autre, de la valeur à leurs clients et à créer des programmes d’assurance transparents. De mon point de vue, ces conditions sont nécessaires pour impliquer les assurés et agir sur leur comportement au volant.

Pour rebondir sur la blague, je peux donner l’exemple d’un constructeur automobile qui a mené une enquête auprès des utilisateurs de l’application de sa marque. L’enquête a révélé qu’il existait une corrélation inverse : plus les conducteurs pensent que leur conduite est bonne, plus leur score est bas ! Cela aurait normalement dû être le contraire. On touche du doigt des choses très intéressantes, tu ne trouves pas ? 

En fait, très souvent lorsqu’on lance un programme de prévention routière, nos interlocuteurs s’attendent à ce que seuls les bons conducteurs participent au programme. Pourtant, la vocation des challenges de conduite est d’améliorer le comportement de conduite des moins bons conducteurs. Ce qu’un assureur doit rechercher en priorité quand il lance un programme de prévention, c’est que les mauvais conducteurs deviennent de meilleurs conducteurs afin de réduire la sinistralité du portefeuille et ainsi réduire ses coûts.

Un bon exemple est le programme que nous avons lancé avec LB Forsikring au Danemark. Nous avons constaté que les mauvais conducteurs, ou du moins les conducteurs qui ont déjà dû s’acquitter de leur franchise, sont plus engagés dans le programme que les autres conducteurs. Ce sont ces conducteurs-là en particulier, ceux qui ont déjà payé une franchise, qui cherchent un moyen de réduire le montant de leur franchise.

Chaque projet que nous avons lancé nous a appris quelque chose de nouveau. J’insiste, il faut du partage de valeur, de la transparence. En tant que fournisseur de télématique, notre métier est d’abord de mesurer. Parce qu’on ne peut pas améliorer ce qu’on ne mesure pas ! La première étape consiste donc à mesurer. Ensuite, il faut trouver les bons leviers pour motiver et inciter les conducteurs à adapter leur conduite.

Florian : Merci beaucoup Philippe d’avoir échangé avec nous.