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Talking Telematics : Les interviews d'experts sur la télématique smartphone et l'assurance connectée

Talking Telematics #2 Quel est le véritable impact de l'écoconduite sur l'environnement et la sécurité routière ?

15/01/2024 • Philippe Moulin

Talking Telematics est une série d'entretiens entre Philippe Moulin, CEO de DriveQuant, et des experts de l'assurance. Tous les sujets abordés dans ces échanges sont exclusivement liés à la télématique et aux avantages de la technologie pour le secteur de l'assurance automobile.

L'interview qui suit est la transcription d’un podcast interne de SCOR. Les deux intervenants sont Graham Johnston, Global Product and Innovation Manager chez SCOR, et Philippe Moulin, Directeur Général de DriveQuant. La transcription a été éditée pour améliorer la lecture.

 

Graham : Bonjour à tous ! Je suis Graham Johnston. Je travaille en tant que Global Product and Innovation Manager chez SCOR. Je suis très heureux de recevoir à nouveau Philippe Moulin pour une nouvelle émission consacrée à la télématique smartphone. La première émission était consacrée à la distraction au volant. Aujourd’hui, nous allons nous intéresser à l’éco-conduite. Bon, Philippe. Il y a tellement de choses à dire sur l’écoconduite, que je ne sais pas par où commencer. Démarrons par la définition du terme. On entend parler d’écoconduite un peu partout, mais de quoi parle-t-on exactement quand on parle d’écoconduite ?

Merci Graham. Ravi d’être de retour dans l'émission. Effectivement, il y a un vrai besoin de définir ce qu'est véritablement l’écoconduite. Concrètement, c'est une série de gestes et de comportements routiers visant à optimiser la consommation de carburant d’un véhicule, et par la même occasion les émissions de CO2. Il y a donc 2 typologies d’actions.

Commençons par les gestes basiques. Cela va de la révision annuelle de son véhicule à l’arrêt de la climatisation lorsque les vitres sont ouvertes. Avec ces gestes de base, il est déjà possible de limiter la consommation énergétique du véhicule.

La deuxième typologie d’action, qui est notre objet de notre travail chez DriveQuant, consiste à modifier le comportement de conduite. Dans ce cas là par exemple, on préconise d’anticiper les freinages pour réduire la consommation d’énergie. Ce type d’action a un impact beaucoup plus important sur l’optimisation de la consommation énergétique du véhicule. L’impact dépasse même les bénéfices strictement écologiques, puisque l’écoconduite contribue également à réduire la sinistralité routière. Il y a donc un impact sociétal important sur lequel il faut insister davantage lorsqu’on mentionne l’écoconduite.

Graham : Effectivement, il est important de prendre en compte toutes les dimensions de l’écoconduite. C’est un sujet qui nous tient à coeur à tous les deux. En termes d’impact environnemental, quels sont les comportements de conduite qui font vraiment la différence ? Et quels sont les gains de carburant qu’un conducteur peut espérer en pratiquant l’écoconduite ?

Nos données indiquent qu’un éco-conducteur peut économiser entre 20% et 30% de carburant au maximum. Bien entendu, tout dépend des types de trajets et des types de routes qu’il emprunte. En moyenne, on constate que la plupart des conducteurs gagnent entre 7 et 10 % de consommation de carburant. Ce sont les ordres de grandeur qu’un assureur doit avoir en tête lorsqu’il lance un programme de prévention routière ou de coaching.

Graham : DriveQuant publie beaucoup d’études quantitatives très approfondies sur les typologies de comportements de conduite. Comment expliquez-vous qu’un conducteur obtienne un gain de carburant de 7% et son voisin 10% ? D'où vient la différence ?

Le contexte routier a un impact très important sur la consommation. Par exemple, pour le contexte autoroutier, on constate que le comportement de conduite a très peu d’influence sur la consommation énergétique du véhicule puisqu'on garde une vitesse stable et constante. Il est donc difficile d'optimiser l'efficacité énergétique du véhicule dans ce contexte car les phases d'accélération et de freinage sont plutôt rares. On peut optimiser la consommation d’énergie du véhicule en roulant à 110 km/h au lieu de 130 km/h pour gagner jusqu’à 20% de carburant. Mais le temps de trajet est impacté.

Il faut comprendre que la consommation d’énergie du véhicule dépend surtout de la vitesse de la voiture. En milieu urbain, un conducteur alterne fréquemment les phases de freinage et les phases d’accélération. Il est donc plus facile de réduire sa consommation d'énergie dans ce contexte sans impacter négativement le temps de trajet. En France et dans d'autres pays d’Europe, le trafic autoroutier représente à peine 30% du trafic global. Se focaliser uniquement sur une réduction de la vitesse sur les autoroutes est donc une erreur car l’impact environnemental de la réduction de la vitesse est limité. Promouvoir l’écoconduite en milieu urbain est essentiel car c’est là que les gains sont les plus importants.

Graham : Restons sur la conduite en milieu urbain. Pouvez-vous nous dire quel est le bon comportement de conduite à adopter ? Il est difficile pour certains conducteurs, et en particulier les conducteurs équipés de boîte auto, d’envisager que leur comportement de conduite influence la consommation de carburant du véhicule étant donné que tout est géré par le véhicule.

Pour éviter que l'écoconduite soit perçue comme contraignant, il faut souligner qu’il est possible d’améliorer la consommation de carburant sans augmenter le temps de trajet. Il faut inciter les conducteurs à rouler le plus longtemps possible à vitesse constante. Il est donc primordial d’atteindre rapidement la vitesse visée et de la maintenir. Il est également essentiel de bien anticiper les phases de freinages. En adoptant ce comportement, un conducteur peut améliorer significativement sa consommation de carburant sans pour autant rallonger son trajet.

Graham : Selon vous, quelle est la vitesse idéale en milieu urbain ?

Il faut une vitesse proche de 30 km/h. Il faut accélérer pour arriver rapidement à 30 km/h et maintenir cette vitesse le plus longtemps possible tout en anticipant les freinages et les arrêts véhicules pour qu’ils soient les plus doux possibles. Et ainsi de suite. Ce ne sont pas des gestes difficiles. Mais il faut du temps pour qu'ils deviennent automatiques.

Ce sont des gestes très efficaces. Dans le cadre d’une expérience menée par La Poste, il ressort que les conducteurs du Groupe formés à l'écoconduite sont parvenus à réduire leur consommation de carburant de 5 %. Et sur la même période, ces conducteurs ont obtenu un taux de sinistralité inférieur de 10% aux autres conducteurs du Groupe qui n’ont pas été formés à l’écoconduite. Cette expérience, et beaucoup d’autres, démontre un lien indéniable entre écoconduite et sécurité routière. Il y a sans aucun doute une forte corrélation entre ces deux phénomènes. Il faut donc envisager l’écoconduite comme un cercle vertueux. D’autant plus que les conducteurs qui ont été formés à écoconduire dans un cadre professionnel adoptent également un comportement de conduite plus sain au volant de leur véhicule familial.

En adoptant le bon comportement de conduite, nos données chez DriveQuant indiquent qu’un conducteur moyen peut gagner environ 8% de consommation de carburant en milieu urbain. Cela peut avoisiner 12 % sur les routes périurbaines. En moyenne, et tous contextes routiers confondus, les conducteurs qui adoptent l’écoconduite économisent environ 10 % de carburant. Si on multiplie ce nombre par le nombre de conducteurs en France, l'impact est colossal !

Graham : Et selon vous, comment les assureurs peuvent-ils promouvoir l’écoconduite ? Comment accompagner la transition énergétique ?

Il est évident que les assureurs ont un rôle important à jouer. Sans compagnies d’assurance, les gens ne peuvent pas utiliser leur voiture sans risque. L'assureur a tout intérêt à coacher les conducteurs et à promouvoir des comportements plus durables au volant puisque, comme je l’ai évoqué précédemment, l'impact sur la sinistralité et sur l'environnement est gigantesque.

De mon point de vue, la première étape est de motiver et convaincre les conducteurs d’adopter l’écoconduite. Pour certains conducteurs, l'adoption d’un nouveau comportement de conduite n’est ni naturel ni justifié. Les assureurs doivent donc lancer des initiatives pour promouvoir l'écoconduite. Cette première phase est indispensable. La bonne nouvelle c’est qu’il existe plein de manières différentes de convaincre les conducteurs de changer leurs habitudes. L’assureur peut notamment lancer un programme de prévention routière ouvert à tous ses membres. Grâce à la télématique smartphone, l’assureur peut mesurer l'impact et la réduction dans le temps des émissions de C02 de ses clients. 

Graham : Concernant la télématique smartphone. C’est une technologie qui existe depuis 20 ans. Mais son adoption est plutôt récente. Son usage n’a pas décollé aussi vite que prévu. Et pourtant, quand j’entends vos conclusions et les bénéfices que cette technologie génère pour les compagnies d’assurance, pour les réassureurs ainsi que pour la société dans son ensemble, sa pertinence est indéniable. Ma question est donc la suivante : quels sont les freins à l'adoption de la télématique smartphone ?

De mon point de vue, l’adoption de la télématique mobile est aujourd’hui surtout une question de volonté de faire. La techno est beaucoup moins chère et plus facile à déployer que d'autres technologies concurrentes, comme les boîtiers télématiques, qui nécessitent parfois une installation par un professionnel. A contrario, lancer un programme basé sur la télématique smartphone est plutôt simple car la technologie est facilement déployable et clé en main. Chez DriveQuant, nous pensons que la télématique sur smartphone est une trousse à outils qui permet aux assureurs de participer activement à la construction d'un monde plus sûr et plus durable, ainsi qu'à la réduction de l'empreinte environnementale de leurs activités. 

Graham : Très bien. Merci beaucoup Philippe. Chez SCOR, nous voulons vraiment nous joindre à vos efforts pour réduire l’empreinte environnementale de la mobilité. Nous sommes très soucieux de protéger l'environnement. L’adoption de la télématique smartphone est à juste titre une question, comme vous le dites, de volonté de faire. Espérons que le partenariat de SCOR et DriveQuant aboutira au lancement de nombreux programmes d’assurance auto connectée basés sur la télématique smartphone. C’est fini pour aujourd’hui. Merci à tous, j'ai passé un super moment à animer cette émission. À la prochaine !